Cameroun- Franck Biya pour succéder à son père à la tête du pays ? 

Cameroun- Franck Biya pour succéder à son père à la tête du pays ? 

Les manœuvres politiciennes engagées par le régime de Yaoundé visent à transmettre le pouvoir au fils de l’actuel chef d’État.

Le quinquagénaire officie dans les plus hauts lieux du pouvoir de Yaoundé. Les salons huppés de la capitale et les ambassades entretiennent dans le secret les rapports avec celui qu’on présente de plus en plus comme le remplaçant de son père au sommet de l’État. Mais son silence habituel, parallèle à l’attitude de son géniteur Paul Biya âgé de 86 ans au pouvoir depuis 39 ans, ne trompe pas les férus de la politique camerounaise. 

Ni l’actuel président de la République, ni l’impétrant n’affichent officiellement les signes d’une telle succession. Tout reste dans l’ombre mais dans le sens de l’efficacité que l’on connait du prince lorsqu’il s’agit de garder la mainmise sur le pouvoir. Ce grand exploitant forestier qui a fait fortune dans l’importation des bois précieux connait peu le Cameroun. En effet, ses fréquentations régulières de l’ Hexagone où il vit presque l’éloignent des réalités du pays. Toutefois, sa filiation lui confère une prestigieuse place au sein de l’appareil d’État, suscitant des interrogations par moments.

Franck Biya : un traitement présidentiel…

Ses mouvements sont un véritable carnaval présidentiel. Les militaires de la Garde Présidentielle ( GP) prennent congé de leur caserne pour le suivre dans ses sorties. À sa présence le tapis rouge est déroulé, les autorités administratives ( ministres, gouverneurs, préfets, sous- préfets etc.), l’accueillent en homme d’ État, dans le respect des normes dues au rang des dirigeants. 

Toute la symbolique y est. On l’approche, murmure à son oreille, se courbe, le suit, le courtise en essayant de montrer son amitié à « l’homme de demain». D’ailleurs il jouit d’une influence reconnue dans l’opinion. Franck Biya fait et défait les ministres et autres commis de l’État, lui, ce parrain à qui plusieurs donneraient tout pour être proches. Conseiller spécial de Paul Biya pendant de longues années, bien que absent de son poste de travail, il côtoie les hommes d’affaires et la hiérarchie militaire avec lesquels il s’est tissé un réseau important. 

À lui seul revient le privilège de fréquenter les intimes de Paul Biya ; une classe d’hommes d’un âge avancé. Pour la bénédiction, dit- on.  Un atout majeur pour sa pénétration dans le sérail. Surtout, dans sa grande villa située au quartier administratif en plein cœur de la capitale, il reçoit parfois les visiteurs de haute marque qui se bousculent sous la vigilance des hommes en tenue, impolis face aux gens pauvres.  Cependant, le cercle restreint du pouvoir composé de potentiels postulants (masqués) à la magistrature suprême essaient tant bien que mal de lui opposer la résistance. 

Entre les officiels et lui la guerre est désormais ouverte pour la conquête du pouvoir à l’échéance de 2025. Néanmoins, Franck Biya s’est doté d’une entité capable de le porter au pouvoir, avec l’appui de son père, sûrement.

Le Mouvement Citoyen des Franckistes pour la Paix et l’ Unité du Cameroun ( MCFP) 

Cet instrument politique constitue la base électorale de Franck Biya. Même si ce dernier n’a jamais déclaré son appartenance au Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais ( RDPC) parti au pouvoir placé sous le leadership de Paul Biya, son idéologie rejoint celle du Renouveau. En réalité, son identité politique revêt un caractère différent  du Rdpc, un parti vomi par les camerounais et tenu pour responsable du mal- être du pays. Alors, dans sa stratégie Franck Biya ne voudrait pas se substituer à cette formation politique mais plutôt à son père Paul Biya qui ne manque pas l’occasion de le conduire à des grands rendez-vous de politique nationale et internationale. Aussi curieux que cela paraisse, le MCFP a réussi à s’implanter dans les villes du pays avec une telle accélération qui paraît invraisemblable. Pourtant le contexte démontre un scepticisme de la population vis- à-vis des hommes politiques. “ Nous sommes un jeune mouvement. Notre ambition est de remporter l’élection présidentielle en 2025. Nous avons tout ce qu’il faut pour gagner”. C’est avec assurance que Rahim Noumeu, cadre du MCFP soutient son propos. “ Nous suivons l’héritage de Paul Biya grâce à Franck Biya notre leader” précise- t- il. Mais les mécontentements se font ressentir à l’intérieur du parti au pouvoir. “ Franck Biya n’a jamais battu campagne aux côtés de son père. 

Je ne comprends pas pourquoi on veut le hisser au sommet de l’État”. La déclaration de ce haut cadre du RDPC qui requiert l’anonymat, fait état des discordes au sujet de Franck Biya. 

“ Non au gré à gré”

Cette expression de Maurice Kamto, président du Mouvement pour la Renaissance du Cameroun( MRC) principal parti de l’opposition, s’offusque de toute transmission du pouvoir politique du père au fils. Dans son combat il dénonce le tribalisme d’ État et la confiscation du pouvoir par un seul individu. 

Or, la mal gouvernance, la corruption, le népotisme, le favoritisme, les détournements de fonds publics sont devenus récurrents au Cameroun. Sans aucun souci pour le peuple l’on voudrait imposer un“ fils à papa” afin de mieux démontrer le paternalisme du pouvoir aujourd’hui combattu mais visible dans bon nombre de pays africains. 

Le Togo, le Tchad, le Gabon et bien d’autres Nations africaines peuvent- elles êtres considérées comme des républiques ? 

Tchuisseu Lowé, chroniqueur.